Le projet on le connait malheureusement trop bien. Rien de nouveau sous le soleil à Gruissan (sur la mer méditérranée près de Narbonne) où un projet « d’écoquartier » menace de détruire 42 hectares de jardins et terres agricoles.

Un collectif de citoyen.nes, l’association SAGNE, lutte depuis 2015 contre la betonisation de ces jardins familiaux (landes, oliveraies, vignes). Ces terres sont menacées par un projet immobilier qui va rajouter plus de 800 logements dans une commune touristique déjà surpeuplée… Débouté au tribunal administratif, iels attendent actuellement de passer en cours d’appel à Toulouse.

Les terres menacées

La Sagne est présentée par ses bétonneurs comme un territoire de friches et de terres inexploitées qu’il faut aménager. Cette vision productiviste de notre territoire ne prend pas en compte la richesse actuelle des terres de la Sagne.

Sur les terres menacées aujourd’hui il existe 52 jardins familiaux : 40 sont communaux et 12 sont des jardins privés. Exploités depuis le XVIIème siècle, leur terre est particulièrement fertile et est la seule terre gruissanaise pouvant accueillir une activité maraîchère.

Riches de plus de 40 puits, certains pluri centenaires et d’architecture remarquable, les jardins, potagers, vignobles etc. sont alimentés par une nappe phréatique importante. Une chance en ces temps particulièrement difficile : les puits ne sont jamais à sec, même en période de sécheresse.

Petit à petit le territoire est entrain de perdre sa biodiversité, sa culture et un certain savoir faire, une disparition qui risque de s’accélérer avec la construction de cette écoquartier.

Le président de l’association de la sagne à déclaré dans un interview donné à L’Indépendant « 24 hectares sont classés en Cru Corbières. Ils constituent un patrimoine immatériel important et la disparition de ce potentiel, ne pouvant pas être compensée, pose la question d’un préjudice non négligeable pour les générations futures de viticulteurs ».

Aujourd’hui les terres des vignobles n’appartenant déjà plus aux propriétaires n’ont pas été relouées et il ne reste que deux viticulteurs qui entretiennent les parcelles.

Loin de la friche dépeinte par les promoteurs, la Sagne est en réalité une terre de boccage, avec de nombreuses haies, des arbres incroyables et une faune remarquable.

 Le projet contesté

Le projet immobilier, qui se prépare depuis 10 ans, prévoit actuellement 830 logements : 240 villas individuels, 194 habitat groupé, 100 habitats touristiques et 296 logements sociaux (près de la déchèterie et de la rocade). L’association Sagne dénonce le fait que les logements sociaux servent de prétexte à l’urbanisation.

Le collectif attire aussi l’attention sur le fait que la délimitation des Espaces Proches du Rivage (EPR) est plus que contestable. Alors que la zone est susceptible d’être inondée, et, avec elle,
les lotissements qui la bordent, comme cela est déjà arrivé : la délimitation EPR évite de justesse comme hasard la zone de La Sagne.

Les porteurs du projet

C’est effectivement la lutte de David contre Goliath car le maire de Gruissan Didier Codorniou est aussi le 1er vice-président de la région, très proche de la présidente qui l’a fait nommer président du parc régional de la narbonnaise et président du parlement de la mer.

Le maire est aussi une ancienne idole du rugby, argument important dans la région ou ce sport est une véritable religion. Les promoteurs immobiliers du projet, Sangalli et Maratuech, sont en réalité eux aussi des anciens joueurs, et même des anciens coéquipiers du maire. Ceci leur apporte un capital sympathie énorme, couplé au fait que le maire bénéficie du soutien du président du groupe de presse régionale, cela rend très difficile la contestation au projet.

Ce n’est donc malheureusement pas une surprise que la Direction départementale des territoires et de la mer et la préfecture approuvent le projet.

 

Historique de la lutte

2018 : révision du PLU et de la délimitation des EPR par la commune
1 – la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAE) a dispensé la commune d’effectuer une évaluation environnementale
2 l’enquêteur public a émit seulement des recommandations, et non des réserves, malgré une forte opposition des associations et de la population

2018 : l’association SAGNE a attaqué au tribunal administratif de Montpellier contre la délimitation des EPR, le non respect de la loi 1986 sur la création de la ZAC pour absence d’alternative, le non respect de la séquence ERC

2021 : déboutée au tribunal administratif, l’association après vote à l’unanimité, fait appel à la cour d’appel de Marseille. Le dossier, pour cause d’engorgement, a été transféré à la cour d’appel de Toulouse et iels attendent toujours d’être convoqué.es.

En attendant, la commune poursuit les étapes du projet, la Zac est créée et le collectif attend maintenant l’enquête publique dans le cadre de sa demande d’utilité publique permettant l’expropriation des propriétaires réfractaires.